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        Poursuivant sa visite, il franchit une porte mitoyenne entre cette chambre pour enfant et la chambre voisine. Cette chambre était beaucoup plus sombre, du fait des fenêtres condamnées, mais dans un meilleur état de rangement que les autres. Ici, rien ne traînait, et il restait même un grand lit deux places qui n'était pas défait, bien calé contre le mur, deux tables de nuit fermées, une armoire massive, et même un tableau accroché au mur, en face de lui. Il lui était impossible d'en deviner le dessin, dans l'obscurité ambiante.
        Ce lit lui paraissait un endroit tout à fait indiqué pour ce que son mental perturbé lui soufflait. Il se retourna et constata avec quelque agacement que la fille n'était toujours pas là. Que faisait-elle donc ? Il ne l'entendait même pas venir dans l'escalier. Il tendit un peu mieux l'oreille. Il y avait comme un bruissement. Ah, c'était enfin elle, soupira-t-il intérieurement. Mais à mieux écouter ce bruissement, il ne venait pas des escaliers, ni du couloir, ni même d'une pièce voisine. Il ne venait pas non plus du rez-de-chaussée. Cela semblait provenir d'en haut. Probablement un rat.
        Il commençait à se sentir un peu nerveux, à la fois du fait de son impatience qui ne l'incitait pas à rester planté ici sans rien faire, à attendre que la gourde se décide à venir, mais aussi parce que cette maison n'était pas vraiment agréable, en fin de compte. Il prenait peu à peu conscience des effluves immondes qui provenaient certainement des couches usagées de la chambre d'à côté, et aussi de l'atmosphère étouffée qui planait dans cette bâtisse close, dans laquelle l'air devait sûrement stagner depuis des années.
        Et puis il y avait ce bruissement. Il était plus net maintenant. C'était plus un tambourinement qu'un bruissement, comme si quelqu'un marchait au-dessus de sa tête. Mince, se dit-il, il y a encore des squatters, ici?
        En tout cas, c'était assez rapide, comme les pas précipités d'une personne. Pour faire quoi ? Attraper quelqu'un ? Quelque chose ? Ou bien vomir?
        Pendant un moment il n'entendit plus rien, et resta figé sur place, voulant entendre le moindre bruit, si ça recommençait. Une véritable nervosité s'était à présent emparée de lui. Il avait envie d'agiter ses jambes, d'aller voir ce qui se passait, ou même de faire les cent pas, mais il s'interdisait à présent tout mouvement.
        Son ventre se noua, sa poitrine se serra. Allons, c'était ridicule. Il essaya de se détendre. Siffler? Chanter ? Non, c'était une mauvaise idée. Se taire, rester silencieux… Non. Il n'en pouvait plus, c'était déjà trop pour lui. Comment avait-elle dit déjà, pour son prénom? Décidément, il ne s'en rappelait plus…
        « Hé ! T'es là ? Y a quelqu'un ou quoi ? »
        Une minute passa. Pas de réponse. Une deuxième minute. Il y alla. La chambre des enfants, les escaliers… Elle devrait être par là. Elle aurait du… Mais il ne vit personne.
        Ainsi, cette conne s'était tirée ! Nono resta un moment sur place, rongeant sa frustration.
        C'est alors que le bruit recommença. Tout son corps se tendit nerveusement. Le bruit ne semblait pas provenir d'au-dessus cette fois. Il était beaucoup plus proche. Tellement proche qu'il lui paraissait résonner dans ses oreilles. C'était particulièrement désagréable. Dans le silence, il avait l'impression qu'on lui soufflait dans les oreilles. Il commençait même à percevoir des syllabes, dans ces sons. Et ces syllabes s'arrangèrent en mots et en phrases. N'était-ce pas son propre surnom, que l'on prononçait ?
        « Nono… Nono… »
        Il ne pouvait y croire. Non, c'était certainement un effet du à son imagination trop fertile. Il secoua la tête. La voix était toujours là, de plus en plus nette… Il s'avança vers la fenêtre ouverte avec un déhanchement saccadé. Peut-être pourrait-il voir la fille et se concentrer sur ce qu'il verrait pour oublier cette hallucination auditive obsédante.
        « Noël… Noël… », disait-elle à présent.
        Quand il parvint devant la fenêtre, il vit son battant pivoter dans sa direction, puis se refermer violemment avec un bruit mat. Il bondit en arrière, tandis que la pièce était plongée dans l'obscurité.
        Un courant d'air. Ce ne pouvait être qu'un courant d'air. Oui, mais voilà, il n'en avait senti aucun… Et d'ailleurs, comment aurait-il pu y avoir le moindre courant d'air dans cette maison entièrement close, bouchée de tout côtés par des planches clouées, et qui sentait le renfermé et la pourriture ?
        Il se jeta sur la poignée de la fenêtre avec énergie. Elle ne tourna pas. Il l'enserra fermement dans ses deux poings et tourna avec autant de force qu'il le pouvait. Tout d'abord elle ne bougea pas d'un millimètre, se contentant de couiner faiblement. Puis, brusquement, la poignée lui resta dans les mains, et il bascula en arrière.


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