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        Sans se laisser décontenancer par l'attitude ridicule de cette petite idiote, il lui tendit les bras avec l'expression la plus avenante qu'il était capable de mimer. La fille hésita, balançant ses hanches d'un côté et de l'autre, jeta un regard à gauche et à droite, puis ses paupières s'abaissèrent comme elle cédait à sa volonté. Ce n'était décidément pas bien difficile, et Nono jubila intérieurement quand elle s'approcha de lui en tendant ses mains aux doigts fins vers lui. Il les prit dans les siennes, et l'attira à l'intérieur avec une poigne virile. Comme elle basculait légèrement, il l'accueillit dans ses bras et la serra fortement avant de l'embrasser à nouveau. Se sachant hors de portée de tout regard, il se laissa aller à promener ses mains sur son corps, allant là où ses envies le menaient, sans la moindre gêne. La fille se tortilla un peu au début, mais il sut la faire renoncer avec sa forte étreinte.
        Lorsqu'il en eut assez de s'amuser ainsi, il la repoussa un peu, et commença à balader son regard dans la pièce. C'était apparemment une sorte de salon. Le sol était encore recouvert d'une moquette sombre, dans un état assez bon, mais aussi partiellement encombré de tas de bois et d'autres choses inutiles ayant été entassées là dans un but inconnu. Il faisait trop sombre pour bien voir les détails de la décoration ou la couleur des murs, mais les deux sorties de la pièce étaient bien visibles.
        Laissant là la fille, se disant que les choses sérieuses pouvaient encore attendre un peu, Nono se mit à explorer la maison, poussé par sa curiosité naturelle. Peut-être y avait-il quelque chose d'intéressant à découvrir ici…
        Il s'avança donc à travers la première porte du salon, et se retrouva dans un couloir qui était partiellement éclairé par le blanc laissé dans la fenêtre du fond, par une planche qui était probablement tombée, ou bien avait été arrachée. Plusieurs portes s'y ouvraient, menant dans différentes pièces. Nono sentit alors une sorte de bien-être s'emparer de lui, comme l'excitation de la curiosité. Elle s'ajouta à l'autre celle qu'il laissait provisoirement derrière lui, et la promesse d'un moment de jouissance le poussait paradoxalement à s'en éloigner, laissant l'attente faire son travail sur ses pulsions.
        A peu près au milieu du couloir se trouvait l'escalier qui menait à l'étage supérieur. Il s'avança vers celui-ci d'un pas lent, regardant au passage dans les pièces devant lesquelles il passait. Un living-room, une sorte de cuisine… Chaque pièce était envahie de détritus laissés ici par les anciens propriétaires, ou apportés par des squatters : une vieille trottinette, des rouleaux de papier peint et de moquette, des casseroles rouillées, quelques ustensiles méconnaissables, des bouteilles cassées, d'autres seringues peu avenantes, une poupée en plastique réduites en pièces, des morceaux de métal de toutes sortes, un peu de bois… Le tout baignant dans une mer de mousse jaunâtre qui sortait d'un coussin de banquette crevé.
        Une fois qu'il fut parvenu devant les marches, il se tourna vers la jeune fille, et lui lança un regard inexpressif – de toute façon, elle ne pouvait distinguer son expression dans le noir, et il était inutile de se fatiguer à vouloir être gentil avec elle – puis il fit signe du menton, pour qu'elle le suive.
        L'escalier avait l'air en très bon état. Un premier pas sur une marche couleur d'ébène l'en convainquit. Il monta rapidement les marches en colimaçon qui menaient à l'étage supérieur. Elles craquèrent à peine sous son poids. Elles montaient encore vers un autre étage, mais sa curiosité le poussa à d'abord visiter celui-ci.
        Le premier étage était encore plus encombré que le rez-de-chaussée : des bouts de bois et de métal d'origine inconnue obstruaient partiellement le couloir principal. Nono chercha du regard un trou dans le plafond, ou un mur qui se serait écroulé, mais tout était en très bon état, jusqu'au papier peint juste un peu vieilli qu'éclairait une fenêtre laissée libre, dans une chambre proche de l'escalier. Il entra dans cette chambre, car il se sentait quelque peu à l'étroit dans le couloir.
        Là se trouvait un nouvel amoncellement d'objets : des crayons de couleur, des couches culotte usagées, des jouets cassés, quelques feuilles de papier à dessin décorées de traits enfantins, un biberon et plusieurs tétines, des restes de bougie près de la fenêtre, et encore quelques ustensiles divers, ainsi qu'une chaise à laquelle manquait un pied sur laquelle était encore assis un nounours en peluche un peu troué.
        Ainsi donc, cette pièce avait vraisemblablement abrité un bébé, et peut-être un enfant en jeune âge il y avait peu, constata Nono. Cela ne lui fit ni chaud ni froid. Il connaissait un peu le monde des squatters, pour en avoir fait partie, dans un passé pas si lointain, et il se tenait éloigné de ce ramassis de malades, de drogués et de dépravés déprimants, comme d'ailleurs de toute communauté humaine. Il était individualiste et fier de l'être, d'ailleurs aucun être humain ne s'était jamais durablement montré digne de sa compagnie.


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