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        Il retrouva l'escalier après le tas de décombres, et commença à en gravir les marches. Celles qui menaient au deuxième étage étaient un peu plus usées que les autres, mais l'ascension n'avait pas l'air dangereuse. Par contre, la pénombre y était plus profonde et, parvenu sur le palier, il avait vraiment du mal à distinguer les choses. Les murs étaient eux-mêmes indistincts, et il n'y avait aucune lumière provenant d'une quelconque fissure qui aurait pu l'aider à mieux se repérer. Aussi leva-t-il ses mains devant lui pour être sûr de ne pas heurter quelque chose, en espérant que le sol était moins encombré ici qu'en bas.
        Tout en marchant lentement, il écoutait. La voix ne parlait plus, et il avait perdu le fil des présences qu'il ressentait encore un instant auparavant, ce qui le convainquit que ça n'avait été qu'une illusion née de son cerveau et de ses nerfs un peu trop tendus.
        Son pied heurta quelque chose de mou, dont il eut du mal à se défaire. Ce devait être un tapis, ou un morceau de moquette décollée. En tendant la main sur sa droite, il parvint à prendre appui sur un mur, afin de dégager son pied. Il avait l'impression de se situer dans un couloir, mais aucune porte n'était visible. Et puis l'odeur de renfermé et de poussière était bien plus forte ici. Ses pas soulevaient tellement de poussière qu'il en avait le nez qui le chatouillait en permanence.
        Peu à peu, comme il progressait dans le couloir, il se rendit compte que cette voix commençait presque à lui manquer, comme si au milieu de cette maison où il se passait toutes ces choses bizarres, cette voix le ramenait à la normalité d'une conversation humaine. Ce n'était pourtant qu'une voix dans sa tête. Et elle lui racontait tellement de sornettes… Mais étaient-ce vraiment des sornettes ? N'essayait-elle pas de faire surgir en lui de ces vieux souvenirs douloureux. N'était-ce pas une sorte de torture qu'il s'était longtemps interdite, et que son inconscient jouait à faire remonter, comme un trop plein de vide-ordures ? C'était comme une litanie de la culpabilité. Et il ne voulait plus l'entendre.
        C'est précisément au moment où il formula intérieurement ce souhait qu'il se tendit physiquement, comme s'il était certain que cela allait de nouveau déclencher cette petite voix. Pourtant il ne se passa rien.
        Il reprit alors son avancée dans l'obscurité, et il remarqua une vague lueur, devant lui. Cette lueur n'éclairait guère le couloir, mais elle lui fournissait un point de repère qu'il décida de suivre.
        Elle était blanchâtre, mais si diffuse qu'elle paraissait presque grise. Ce n'était qu'un faible halo qui semblait émerger d'une pièce voisine. Ses pas le menèrent sans faillir dans cette direction. Pas d'autre accroc dans le sol, pas de bazar pour entraver sa marche.
        Pourtant la lueur n'était pas vraiment plus nette. Il n'était plus qu'à quelques pas de celle-ci, mais il n'y voyait toujours rien. Il avança sa main vers l'encadrement de la porte de la pièce d'où elle provenait et l'agrippa. Cela lui permit de faire le dernier pas sans craindre de trébucher sur un dernier obstacle, et il se trouva dans l'encadrement de la porte.
        Tout ce qu'il vit fut la silhouette de la fille. Elle avait une allure quelque peu étrange, et plusieurs choses le dérangeaient dans ce qu'il voyait, sans qu'il puisse immédiatement mettre le doigt dessus. Peut-être était-ce son attitude générale. Elle était assise sur quelque chose qu'il ne pouvait pas voir, peut-être un lit, la tête inclinée en avant, les cheveux pendants. Peut-être étaient-ce ses vêtements. Tout à l'heure elle portait un haut de couleur fuchsia, et à présent, elle n'avait plus qu'une sorte de robe de chambre de couleur claire, et ses pieds étaient nus. Peut-être enfin était-ce parce qu'il était si visible dans le noir, alors qu'aucune lumière ne filtrait nulle part dans la pièce. En fait, il lui semblait que la vague lueur blanche venait de la fille elle-même. Cette lumière opalescente paraissait provenir de chaque cellule du corps de cette fille, ainsi que des vêtements qu'elle portait. Il y avait là quelque chose de totalement irréel qu'il ne pouvait croire. Il avait beau chercher une fissure dans un volet, ou entre les poutres du plafond, il n'en trouvait pas la moindre, et il ne parvenait qu'à peine à discerner l'intérieur de cette pièce.


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