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        Il se retourna et il vit que Karbatsche était déjà installé dans un grand divan vert, un verre à la main. Et un autre canapé se trouvait si près de lui qu'il n'avait déjà plus qu'à plier les genoux pour s'y asseoir. Une petite table se trouvait à portée de sa main avec tout un choix de boissons multicolores. Il eut envie de demander d'où sortait tout cela, mais craignant de relancer une discussion sur les possessions de cet homme, il préféra se taire. Une chose lui paraissait déjà certaine: pour être aussi riche, Karbatsche devait forcément profiter de quelque privilège inconnu. Cela était déjà une caractéristique d'exploiteur. Il lui fallait amener doucement la conversation sur ce sujet.
        Il saisit un verre au hasard, sans même demander de quoi il s'agissait, pour se donner une contenance.
        - Parlons un peu de vous. Je sais que vous êtes patron, mais quelle est votre entreprise ?
        - Vous voulez parler du travail que j'effectue ici ?
        - C'est bien cela.
        - Ah, eh bien c'est toute ma vie vous savez. J'aide les gens d'ici à continuer à vivre ?
        - Continuer à vivre ? Vous voulez dire que vous leur donnez du travail ?
        - Si vous voulez, mais c'est bien plus que ça.
        - J'aimerais que vous m'expliquiez.
        - C'est ma passion depuis toujours, et de père en fils.
        - Vous avez repris l'affaire de votre père ?
        - Qui la tenait de son père, et le père de mon père de son père à lui, depuis des dizaines de générations, oui en effet.
        - Et vous comptez la transmettre à votre fils ?
        - Hélas je n'ai pas de fils. Pas encore.
        - Pour quelle raison ?
        - C'est difficile vous savez, je n'ai guère le temps de me chercher une femme.
        - Vous êtes trop occupé par votre travail ? Vous semblez pourtant avoir du temps pour vous, non ?
        - Pas vraiment, le temps que je passe avec vous est la première pause que je m'accorde depuis mes dernières vacances il y a dix ans.
        - Vos dernières vacances remontent à dix ans ?
        - C'est bien cela oui, dix années. Je suis bien malheureux parfois, mais il faut bien que le veille sur ces pauvres travailleurs.
        - Pourquoi le faut-il ?
        - C'était plus facile du temps de mes ancêtres, mais la population a considérablement augmenté depuis quelques décennies. Songez que mon grand-père ne devait veiller que sur 500 millions d'ouvriers, alors que j'en ai dix fois plus !
        - 500 millions c'est déjà énorme !
        - Je vous le concède. Ah... Les vacances me manquent tellement...
        - Alors vous ne pouvez pas utiliser vos autres résidences, je vue dire, sur les autres planètes ?
        - Vous devinez bien jeune homme. Je me languis des paysages exotiques...
        - D'un autre côté vous avez déjà beaucoup de paysages à votre disposition ici, vous ne trouvez pas ?
        - C'est vrai, mais je les vois si souvent, je vois chaque paysage presque une fois par an, rendez-vous compte ! De plus ils finissent par tous se ressembler...
        - Mais pourquoi ne vous faites-vous pas aider ?
        - J'y ai songé voyez vous, mais cela est extrêmement délicat. Comment voulez-vous que je parte chercher un gardien sur une autre planète ? Je devrais laisser mes chers travailleurs seuls pendant de longues semaines.
        - Seuls ? Mais ils sont 5 milliards, ont-ils tellement besoin de votre présence ? Et puis vous êtes bien parti en vacances il y a dix ans, comment avez-vous fait ?
        - Il y a dix ans, lorsque je suis parti en vacances deux semaines, il y a eu un incident ici ! Je ne peux vraiment pas les laisser seuls. Si je les laissais seuls trop longtemps, la situation dégénérerait !
        - Mais comment pouvez vous veiller seul sur 5 milliards d'employés ?
        - D'ouvriers voulez-vous plutôt dire. Eh bien je ne sais pas, mais je m'en sors à peu près. Seulement je ne peux pas m'accorder de pause. Je suis obligé de ne pas dormir.
        - Vous ne dormez pas ? Mais comment faites-vous ?
        - Je prend d'excellentes pilules que j'ai en stock ici. Cela me permet de rester éveillé en permanence.
        - Ça alors... Pourriez-vous me parler du genre d'incident qui se produit lorsque vous ne surveillez pas vos employés... vos ouvriers ?
        - Ma foi, c'est assez désolant, mais il leur arrive de se battre. Et cela nuit terriblement au travail, comme vous l'imaginez bien.
        - Pourquoi si battent-ils ?
        - Je ne sais pas exactement. Il m'arrive de ne pas très bien comprendre mes ouvriers. Ce que je sais, c'est que cela nuit à tout le monde.
        - Bien. Cela fait un moment que je suis curieux de voir comment fonctionnent vos ateliers, vos usines. Est-ce possible ?
        - Bien sûr. Dans ce cas, venez.


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