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        Il réfléchit quelques instants. Tandis qu'il réfléchissait, il nota la nervosité de ces deux interlocuteurs. Le conseiller n'était peut-être pas si serein, finalement.
        Qu'aurait-il bien pu vouloir voir ? La Lune, bien entendu ! Pas la peine de chercher plus longtemps.
        - Oui, je sais, je voudrais aller voir la Lune.
        - La lune ? S'étonna le conseiller.
        - Oui, la Lune.
        - Mais pourquoi la lune ?
        - Vous posez plus de question que vous ne le dites, remarqua le petit garçon avec audace.
        Le roi toussota.
        - Bien... Euh... La lune, la lune... Hum...
        Un long silence gêné s'ensuivit, puis le roi et son conseiller échangèrent quelques murmures.
        - Hem, fit le conseiller, tandis que le roi se taisait, une main collée sur sa bouche comme s'il avait peur qu'une phrase malencontreuse ne s'en échappe. Oui... Eh bien... La lune... Pourquoi pas ? Mais il y a sûrement aussi un autre endroit que vous... que tu voudrais visiter.
        Le conseiller n'avait l'air ni calme ni serein en aucune manière, en définitive. C'était tout à fait comme si lui et le roi avaient peur de dire quelque chose qu'il ne fallait pas dire. Cela l'agaçait de plus en plus.
        - Mais pourquoi un autre endroit ? Je veux aller voir la Lune et c'est tout !
        - D'accord... Fit le conseiller avec une voix à demi-éteinte. C'est...
        Il s'interrompit, puis sembla réfléchir une fraction de seconde.
        - Eh bien nous allons faire notre possible. Hum... Nous devrions peut-être commencer par te permettre de consulter quelques ouvrages sur la lune... Il y a de très belles images, cela te plaira sûrement !
        - Mais non ! Je ne veux pas voir d'images, je veux aller voir la Lune en vrai !
        Le conseiller s'agita et s'appuya sur le fauteuil du roi. Ses yeux roulaient, comme s'il cherchait une idée écrite quelque part sur un mur de cette pièce. L'attitude des deux hommes devenait pour le moins énervante. Combien de temps allaient-ils le faire tourner ainsi en bourrique. Il décida de les piquer un peu.
        - Comment ça se fait qu'on est encore ici alors que je voudrais juste partir voir la Lune ?
        - Hum... Ne sois pas si impatient, demanda le conseiller d'une voix qui se voulait apaisante. Nous allons très vite trouver une... Je veux dire, nous allons très bientôt y aller.
        Le garçon tapa du pied, ce qui sembla provoquer l'agitation du roi qui chercha successivement plusieurs façons de s'asseoir sur son fauteuil.
        - Quand ça ? Insista-t-il.
        - Euh... Tout de suite, tout de suite ! S'excita le conseiller.
        Il tapa dans ses mains. Quelques secondes passèrent puis quelqu'un entra dans la salle. Cette personne avait une allure un peu bizarre, et un physique rondelet. Il mit du temps à déterminer s'il s'agissait d'un homme ou d'une femme.
        - Oui ? Demanda la personne qui s'avéra être une femme.
        - Venez ici ! Lui commanda le conseiller.
        Et la femme s'avança vers lui d'un pas pressé. Le conseiller lui glissa quelques mots dans le creux de l'oreille, mais elle ne sembla pas comprendre, si bien qu'il recommença. Le manège se poursuivit plusieurs fois. Soit la femme était sourde, soit - comme son expression d'étonnement le laissait supposer - elle ne parvenait pas à croire ce que lui disait le conseiller.
        En tout cas on lui faisait bien perdre son temps pour une chose aussi élémentaire. Sa demande était pourtant simple. Il s'énervait de plus en plus. Il remarqua alors que la femme s'avançait vers lui.
        - Alors comme ça, tu veux aller sur la lune ?
        - Je n'ai pas dit ça.
        - Quoi ? Mais c'est pourtant ce que...
        Elle se retourna vers le conseiller qui parut aussi surpris qu'elle. Puis elle fit à nouveau face au petit garçon, en essayant visiblement de se recomposer une expression sûre d'elle.
        - Mais qu'est-ce-que tu as...
        - Oh ! Mais vous êtes vraiment énervant à la fin ! Je crois que c'est pourtant simple ! Je..."
        Ils l'avaient poussé à bout avec leur manière de lui faire perdre son temps. Il se sentait littéralement exploser de colère. Le sang lui battit aux tempes, son pouls s'accéléra, et une chaleur intense lui prit l'estomac.
        La détonation fut terrible. De longues flammes oranges vinrent noircir les murs de la pièce tandis que le roi et son conseiller bondissaient à l'abri du grand fauteuil.
        Le monde sembla trembler longuement autour d'eux, et les échos de la détonation firent bourdonner leurs oreilles un long moment avant qu'ils puissent retrouver leurs esprits.
        Il fallut attendre un long moment avant de les voir ressortir de leur cachette. Le conseiller hochait la tête de dépit tandis que le roi affichait une mine attristée en contemplant l'ampleur des dégâts.
        "C'est une catastrophe, dit le conseiller.
        - Pourvu que ça ne se sache pas, renchérit le roi.
        - Je crois qu'elle est morte dans l'explosion, et regardez un peu autour de vous ! Si vous croyez qu'avec ça les gens ne vont pas savoir...
        - C'est à chaque fois la même chose, se plaignit le roi. Pourquoi faut-il toujours que nous soyons aussi maladroits avec les rêves ?
        - Ne vous posez pas ce genre de question, je vous en prie. Vous êtes tout de même le roi de ce monde."


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